RESULTATS, COMPTES RENDUS ET PHOTOS DES FOULEES DE GRUFFY / 12-04-15

Par François Vanlaton :

TRAIL CHERAN-SEMNOZ : BENJAMIN LEMAY EN TOUTE SERENITE

Egérie de l’Athlé Saint-Julien 74 et du Team Instinct, Benjamin Lemay n’aura jamais été inquiété à l’occasion de cette édition princeps, concourue le 12 avril à Gruffy (1500 âmes), sur le versant occidental du Semnoz, à quelques encablures d’Annecy. De bagarre, il n’y en eut point, son succès résultant d’une cavalcade solitaire à travers 25km pour un différentiel de 1400m. Pourtant, les écarts avec ses deux poursuivants immédiats, 2’22 avec Thibaut Garrivier (La Foulée d’Annemasse, section de l’Entente Athlétique de l’Arve) et 2’33 avec Pascal Giguet (Team Scott Odlo Led Lenser), auraient pu laisser supposer le contraire.
Dès le départ, il prenait résolument les rênes de la course, alternativement avec Stéphane Avrillon (Team Tecnicien du Sport Seynod et Espérance Favergienne), 40 ans, mais surtout Jérôme Bosch, 45 ans ce 16 avril, accouru en voisin de son village de Viuz-la Chiésaz. Sur une portion roulante qui allait perdurer 5km avec seulement 120m de dénivelé, le trio entraînait dans son sillage un groupe d’une douzaine d’unités qui voyait Giguet jouer les serre-files.

Baroud d’honneur pour Bosch
A son grand étonnement, le vainqueur du dernier Red Bull Eléments avec ses potes du Team Instinct se retrouvait seul au moment où il entamait la première ascension de 500m de dénivelé en direction du Semnoz. Unique frayeur dans sa chevauchée, le retour, au prix d’une descente acrobatique, de Bosch, intervenant à quelques centaines de mètres du ravitaillement installé devant le cimetière de Gruffy (km12). Une frayeur toute temporaire, le kamikaze jetant l’éponge au ravito après avoir annoncé la fin de sa… carrière à Benjamin qui en resta coi : « C’est quand même incroyable de remiser définitivement ses baskets sur cet abandon ! Et puis dommage aussi pour l’intérêt de la course car Jérôme pouvait finir sur le podium, et peut être même devant moi ! »

Partie de plaisir pour Lemay
La suite sera un long fleuve tranquille pour cet ancien vététiste de haut niveau (jusqu’en 2004), comme il le raconte si bien : « J’ai donc continuai seul en tête jusqu’au terme de l’épreuve, admirant ce versant du Semnoz qui m’était étranger jusque-là. La seconde descente, hyper-raide et limite dangereuse, me transplantait au pont de l’Abîme où j’avoue ne pas avoir pris le temps de contempler, 96m plus bas, les fameuses gorges du Chéran… Le single-track vallonné qui les sillonnera m’a vraiment régalé, en particulier les marches en rondin et les multiples relances au bord du torrent. Je passais la ligne avec une avance assez confortable et avec beaucoup de plaisir. Un beau parcours technique, à refaire si possible l’an prochain ! » Des propos qui reflètent on ne peut mieux sa facile victoire.
Dans l’immédiat, le natif de Montbrison (Loire), âgé de 32 ans, prépare activement les Championnats de France de 10km à Aix-les-Bains (19 avril) puis ceux de courses en montagne au Revard (7 juin, 20ème en 2014). Entre temps, on le reverra pour la troisième fois au Malpassant (27km pour 1400m de dénivelé), disputé dans le cadre du Nivolet-Revard, qui, pour ses grands débuts en trail, lui était revenu en 2011 avant de s’approprier la 5ème place l’an passé. Sinon, il prendra cet été le départ de la Montée du Nid d’Aigle (19 juillet, 7ème en 2013), du Bélier (22 août, 1er en 2014) et du Red Bull Eléments où il n’aura manqué aucun épisode (19 septembre, 1er en 2014).

Le vieux briscard et le jeunot
A l’arrière, deux hommes auront tout donné pour enrayer la mécanique du fuyard :
– Le Haut-Savoyard Pascal Giguet qui malgré ses 46 ans continue à s’illustrer comme en témoignent ses prestations intervenues depuis le début de l’année : victorieux sur le 100km de l’Ultra du Bout du Cirque et le 45km du Trail de Mirmande, 3ème sur le 64km de l’Endu’rance Trail des Corsaires.
– Le Gapençais Thibaut Garrivier, 24 ans, licencié cette saison à l’Entente Athlétique de l’Arve, mettant à profit un stage de six mois à l’hôpital d’Annemasse en tant qu’interne en radiologie (7ème année de médecine).
Deux hommes qui auront cavalé de conserve avant que Thibaut, à 500m de l’épilogue, ne prenne un léger avantage, précisément de 11’’. Un Thibaut qui revient spécialement pour nous sur sa performance :
« L’entame prudente de mes compagnons d’avant-garde m’est allé comme un gant car j’éprouvais de sérieux doutes sur ma forme, étant donné la soirée passablement arrosée de la veille à Lyon !
Dès les pourcentages du Semnoz, je laisse partir Lemay car je suis d’abord là pour faire du km, effectuant en effet ma première sortie « longue » cette année. Très vite, je fais cause commune avec l’emblématique Pascal Giguet. On s’éclate mais sans prendre toutefois trop de risques dans cette deuxième descente très ludique qu’on ne voit même pas passer, puis Pascal m’emmène tout au long des 5km des gorges du Chéran sur un sentier cassant et toujours très amusant. Amusant certes, mais pas pour mes jambes qui commencent sérieusement à fatiguer, à tel point que je ne parviens pas à relayer, souffrant en silence !
A la sortie, on nous annonce 2km de route, ce qui nous incite à accélérer progressivement, d’autant plus que nous somme boostés par une foule en liesse sous un soleil qui n’hésite pas à darder ses rayons. A moitié esquinté, je n’en réussis pas moins à devancer de peu Pascal.
Excellent choix de première course, complète pour démarrer la saison : 5km rapides pour dérouler et étirer le peloton, puis deux petites bosses bien pentues, la seconde hors trace, en l’occurrence le must, enfin des descentes techniques et ludiques à souhait. Bref, un parcours que je ne pensais pas trouver pour mon premier trail en Pays de Savoie et qui me rappelait mes Hautes-Alpes ! »
Skieur de fond à la base avant d’arrêter prématurément à cause de ses études de médecine, Thibaut Garrivier aura étrenné le trail le 25 mars 2012 sur un pari, finissant 26ème au scratch et 1er espoir du 46km du Ventoux. Pour le moment, il louvoie entre la courte et la longue distance, accomplissant régulièrement des perfs de choix (1).
Du fait de son interminable et difficile cursus médical, et par ricochet, de son manque d’entraînement, ce gaillard d’1m81 pour 67kg ne s’assigne cette année aucun objectif à proprement parler. Il n’en est pas moins inscrit sur le 23km du Lyon Urban Trail qui se tiendra ce 19 avril.
Par ailleurs, observons le joli tir groupé des quadras qui placent trois des leurs aux 3ème, 4ème et 5ème rangs, accaparés respectivement par Pascal Giguet, Stéphane Avrillon et Thierry Belzuz (Gendarmerie de Seynod).

Duel au sommet
Rarement sur une course aussi locale, on eut droit à un tel plateau féminin. Avec en première ligne l’emblématique Caroline Chaverot (Team Hoka), 38 ans, championne de France de trail en titre, et la non moins redoutable Corail Bugnard (Team Tecnica), 24 ans depuis la veille, 5ème des France de trail court 2014. Juste derrière elles, on relevait la présence de l’Allemande Romy Mey (Annecy Haute-Savoie Athlétisme et Salomon), 33 ans, victorieuse du Trail Blanc de Serre Chevalier il y a trois mois, ou encore l’Annécienne Lucile Besson, 27 ans, 5ème du 29km des Glaisins le week-end dernier. Et n’oublions pas non plus les expérimentées Sandrine Motto-Ros (Teams Tecnica et 42km195 ; Annecy-le-Vieux Of Course), Sylvie Negro (Team Activasport et Entente Athlétique de Chambéry) et Blandine Daval-Pommier qui opérait quasiment à domicile pour habiter Cusy, en rive gauche du Chéran.
Venue s’aguerrir sur la courte distance après sa déception survenue aux Glaisins où, 2ème, elle concédera pas moins de 6’ à Stéphanie Duc, Caroline talonnait de près Romy et Corail sur le prologue de 5km. Après s’être débarrassée de la première dès l’attaque de la montée initiale sur le Semnoz, Caro se lançait à la poursuite de Corail qui n’en conservait pas moins son avance même si celle-ci s’effilochait au fil du tracé : 1’ en bas de la première descente (km12), 30’’ en bas de la deuxième descente (km17).
Le dénouement aura lieu dans les gorges du Chéran où Caro réduisait encore l’écart d’une dizaine de secondes avant de perdre de vue celle qui n’est autre que son équipière au sein du Club Athlétique du Bassin Bellegardien. Et pour cause, Corail venait de s’égarer à 3km du but, et ce durant une minute, laissant le champ libre à la Franco-Suissesse. Dommage car cette erreur aura sans doute privé le final d’un scénario hitchcockien, vu le différentiel à l’arrivée (1’08). Mais comme le dit Caro, « ce sera pour une prochaine fois ! » En attendant, elle intégrera, du 18 au 24 avril à Annecy, le stage de l’équipe nationale de trail dans l’optique des Mondiaux, prévus le 30 mai sur le parcours de la Maxi-Race. En tout cas, pour leur première course ensemble, les deux Cabistes (2) auront été à la hauteur de leur réputation, livrant un combat sans merci, de toute beauté, qui fait vraiment honneur au trail.
Concluant 1’33 après Corail, Romy Mey grimpait sur la plus petite marche. Complétaient le top 5 Lucile Besson, une des révélations en ce début de saison, puis Sandrine Motto-Ros, 1ère vétérane.

François Vanlaton

(1) En dépit de son jeune âge (il a vu le jour le 6 septembre 1990), Thibaut Garrivier est déjà l’auteur de belles prouesses. Mettons ainsi en exergue :
– 2012 : 9ème sur le 45km du Gap’en Cimes.
– 2013 : 9ème sur le 21km du Trail Drôme Lafuma (manche du TTN court) ; 1er sur le 23km du Grand Trail des Ecrins ; 1er ex aequo avec Stéphane Ricard sur le 37km de l’Ultra Champsaur.
– 2014 : 1er sur le 37km de l’Ultra Champsaur ; 8ème sur le 42km du Trail Ubaye Salomon.
(2) Le Cabiste est le nom donné au sociétaire du Club Athlétique du Bassin Bellegardien..

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